APHG
Régionale de 
Basse Normandie



Mercredi 29 janvier 2003 :

La Rome antique face aux catastrophes naturelles
Conférence de Mme Catherine Bustany
Maître de Conférences, Université de Caen





(à la fin de ce texte, les liens web vers les documents fournis) 
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Un colloque " Le traitement médiatique des catastrophes : entre oubli et mémoire " est prévu à Grenoble les 10 et 11 avril 2003.

L'intérêt porté ces dernières années aux questions d'environnement, à la relation homme - milieu, rendu encore plus aigu par l'actualité récente, n'est pas l'apanage des sociétés contemporaines.

La notion de " risques naturels " est récurrente dans l’histoire de la ville de Rome dans l’Antiquité. Cette notion est très présente dans les sources de cette histoire, chez les historiens de l’Empire comme Tite-Live, Suétone, Tacite et Dion Cassius, même si le concept n’est alors ni analysé ni clairement défini.

Aujourd’hui, ces risques sont interprétés par les spécialistes comme le produit de 2 séries causales :

d’une part une variable naturelle, définie comme un aléa - ici le Tibre, un fleuve méditerranéen impétueux, aux crues brutales et spectaculaires - , mais aussi le relief contrasté de la ville aux 7 collines ou encore sa situation en Italie centrale, dans une zone de sismologie active

d’autre part une variable humaine, définie comme une " vulnérabilité " : ici, une mégapole d’un million d’habitants à l’époque d’Auguste ; habitat dense, rendu fragile par sa structure (précarité des insulae) et par le choix des matériaux de construction : seuls les murs porteurs sont en opus caementicium, les cloisons sont en torchis avec légère armature de bois, charpentes en bois). Le thème de leur écroulement, parfois consécutif à la stagnation des eaux qui en sape les fondations, n’est pas seulement un lieu commun.

Ainsi, dans Juvénal, Satires, 3, 190-194 : " qui craint, qui a jamais craint l’éboulement de sa maison dans la fraîche Préneste […] Mais nous, nous habitons une ville qui n’est en grande partie étayée que sur de minces poutres. C’est de cette façon que le gérant pare aux écroulements ".

Dans un tel contexte, le risque majeur est bien sûr celui de l’incendie, qu’il soit d’origine accidentelle (braseros pour se chauffer, lampes à huile pour s’éclairer) ou politique (divers " attentats " à la fin de la République - incendies en 52 av pour la Curie dans laquelle Clodius fut incinéré, en 44 av au cours des funérailles de César - , en excluant et en disculpant toutefois Néron pour le grand incendie de 64 ap.

Mais cet exposé ne s’intéresse qu’aux incendies dus à la foudre, et aux autres " catastrophes naturelles " : inondations, séismes, cataclysmes météorologiques comme les tempêtes ou les pluies de pierre relatés par les sources.

Il nous appartiendra

I - dans un premier temps de montrer la récurrence des catastrophes et d'établir un bilan des destructions qu'elles entraînent.
II - avant de voir qu'il est difficile de proposer une approche scientifique de ces données tant les sources relèvent de constats subjectifs souvent empreints de superstition par rapport aux événements
III - Enfin nous rechercherons si le pouvoir républicain ou impérial a cherché à mettre en place des moyens de lutte pour réduire les conséquences destructrices des catastrophes naturelles
 

I Les catastrophes récurrentes et destructrices

1 Les crues du Tibre

Le recensement mené par Joël Le Gall, pionnier en la matière, dans sa thèse Le Tibre de Rome dans l'antiquité, entre 414 av JC et 398 ap JC (publiée en 1952) avait permis d'établir de 4 à 6 par siècle la fréquence d'inondations majeures.
Mais encore faut-il s'entendre sur cette notion et la reprise de l'investigation pour ma thèse dont les résultats furent publiés dans les cahiers de la MRSH (25/2/2001) conforte cette périodicité.
(cf tableau pour le IIIe av : 4 entre 241 et 202 av, dont 2 années consécutives, 203-202
pour le IIe, 5 entre 196 et 156 , avec des dates rapprochées qu'on imagine traumatisantes, 193, 192, 189, 181 av).

En résumé du Ve à la fin du II av JC, 11 crues ont été recensées dont 2 particulièrement violentes, en 192 et en 189. L'important hiatus chronologique entre 156 av et 54 av (première crue signalée pour le 1er siècle) est sans doute bien davantage la conséquence de la perte de l'Histoire de Tite-Live pour cette période que celle d'un réel assèchement du bassin du Tibre. Avec Cicéron, Horace, Dion Cassius pour ne citer qu'eux, le 1er siècle av offre une récurrence davantage dans la norme et la fin de la République connaît 2 crues paroxysmiques en 54 av et 29-28 av où le Forum fut inondé - dommages subis par la Regia et le Temple de Vesta à la suite de quoi l'ère augustéenne de 27 av à 15 ap dut subir 8 fois l'invasion des parties basses de la ville. D'où les mesures préventives sur lesquelles nous reviendrons.
 

2 Les tremblements de terre

Les séismes sont assez fréquents à Rome : on trouve dans les sources 15 occurrences pour la seule période républicaine entre 461 av et 43 av.

Mais en revanche il semble qu'à de rares exceptions près, le phénomène soit plus impressionnant que réellement destructeur. Interprété comme signe de la rupture de la pax deorum, comme prodigium, il peut avoir aussi valeur de présage comme en 63 av pour la conjuration de Catalina (Plutarque, Cicéron 14.4, Cicéron, 3e Catalinaire, 18). Comme prodigium, il nécessite des journées de prières publiques et des sacrifices expiatoires parfois prescrits comme les Livres sybillins comme en 192 pour en assurer le procuratio.

La dimension religieuse l'emporte donc dans les sources sur le constat objectif des dégâts ou le souci d'une évaluation "scientifique" (cf les échelles contemporaines). Il faut dire que les historiens de l'antiquité ont eux-mêmes utilisé des sources religieuses, dont les Annales des Pontifes qui orientent aussi leur témoignage. [ cf le Liber prodigiorum de Julius Obsequens ].

Toutefois, l'aire de Rome, centre de l'observation scrupuleuse de la procuratio prodigiorum est marginale par rapport aux épicentres relevés dans l'Apennin ou les Monts Albains, de sorte que pour la période républicaine, sur 16 séismes recensés, 2 surtout sont signalés comme destructeurs : celui de 83 av qui selon Appien (Dion Cassius I, 83) provoqua la destruction de nombreux temples, et celui de 70 av rapporté par Phlégon de Tralles, affranchi d'Hadrien, qui vit l'écroulement de nombreuses maisons. En 15 ap, selon Dion Cassius (LVII, 14) de violentes secousses firent tomber une partie des murailles [année terrible, avec inondations concomitantes ]

En revanche, en 192 av, la terre trembla pendant plus de 30 jours, mais ces secousses répétées furent peu destructrices au regard de l'incendie et des inondations qui, la même année, dévastèrent le Forum Boarium et emportèrent 2 ponts de Rome.

Il semble donc que Rome n'ait guère subi de préjudice matériel grave du fait des séismes, ce qui rend moins amère notre impuissance à en rendre compte scientifiquement.
 

3 La foudre et les tempêtes

Phénomènes météorologiques violents, les orages méditerranéens peuvent être destructeurs et apparaissent particulièrement fréquents : 218, 214, 212, 211, 209, 207, 206 av … 49 occurrences entre le milieu du IV av et 65 av.

Les temples situés sur les hauteurs sont les plus touchés, et plus particulièrement le Capitole - cf carte des impacts.
Les dégâts peuvent être mineurs : en 190 av, au Temple de Junon Lucine sur le Caelius, le faîte et les battants de la porte sont endommagés (Liv 37,3,2)
En 49 av, la foudre endommage le sceptre de Jupiter, le bouclier et le casque de Mars sur le Capitole et les colonnes sur lesquelles étaient gravées les lois (Dion Cassius, 41, 14.3)

La foudre est davantage dévastatrice quand elle provoque un incendie qui détruit le temple :
167 av temple des Dieux Pénates sur le Velia
91 av temple de Pictas détruit par un orage (Julius Obsequens)
9 av Capitole et nombreux temples proches frappés par la foudre et ravagés par la tempête (Dion Cassius, 55.1) - Il s'en suit des restaurations augustéennes (RG, 20)

Mais comme pour les séismes, la dimension religieuse (Prodigium) prévaut : en 14 ap, à la mort d'Auguste, la foudre frappe la statue d'Auguste sur le Capitole et efface la première lettre de l'inscription Caesar (Dion Cassius, 56,29). Que les édifices religieux soient le plus touchés entraîne un luxe de détails dans les récits.
 

II Les difficultés d'une approche scientifique

Ces difficultés tiennent à 3 facteurs :

D'abord la nature des sources :

Pour l'essentiel, il s’agit de sources littéraires, souvent largement postérieures aux événements relatés. Ainsi pour les récits de l'histoire républicaine, Tite-Live et Dion Cassius, pour ne citer qu'eux, écrivent respectivement au I ap et au II-IIIe , Orose est un historien chrétien du début du Ve. Ce ne sont pas des témoins oculaires, et la qualité de leurs sources est à soulever.
La prudence est aussi nécessaire pour les écrivains contemporains des faits, comme l'est Cicéron : leur perception subjective, " l'émotion ", prend parfois le pas sur le constat méthodique.

A l’époque romaine, ces sources littéraires n’ont pas vocation à toucher un grand public. Il n’y a donc pas d’approche " médiatique ". Tout au plus, quelques inscriptions célèbrent l’œuvre de restauration du prince, ou quelques images " montrent " comme à Pompéi les dégâts causés par un séisme, celui de 62 ap.

L’archéologie et l’épigraphie sont des sources indispensables et objectives. L’archéologie a permis de réfuter l’historicité de l’incendie de 390 av imputé au pillage de la ville par les Gaulois : aucune trace ne vérifie cette croyance, due au traumatisme de l’événement, et à la recherche d’excuse des carences en matière d’organisation de l’espace. Mais l’archéologie est tributaire des chantiers et des aléas des découvertes.

L’autre difficulté réside dans notre méconnaissance de la topographie précise de Rome dans l’Antiquité.

Rares sont les cartes actuelles cotées, surtout dans les parties basses où les lignes isohypses sont trop espacées pour permettre de définir avec certitude les zones inondables. A cela s’ajoutent les modifications de la topographie urbaine entre l’Antiquité et nos jours: il est désormais acquis que la topographie primitive de la plaine est enfouie sous plusieurs mètres de décombres et de déblais. Le Forum Romain est actuellement 7.80 m plus bas que la Via dei Fori Imperiali. Au Largo Argentina, le niveau impérial est de 4.50 m inférieur à celui des rues d’aujourd’hui.

Il est nécessaire d’utiliser les relevés de fouilles, quand ils existent, pour apprécier ces modifications

Enfin, la perception du phénomène, privilégie dans les sources le spectaculaire au détriment de l’établissement objectif d’un bilan qui permettrait de le cartographier précisément. Brutale et catastrophique, l’inondation est considérée comme le résultat d’une perturbation de l’ordre naturel. Elle est à ranger parmi les manifestations de la volonté divine. C’est un avertissement des Dieux.

Ainsi, l’inondation de 69 ap est relatée par Tacite, Suétone et Plutarque parmi la série des phénomènes extraordinaires, signes d’un dérèglement de l’ordre du monde, qui annonce la guerre civile.

La conjonction de ces 3 éléments a pour corollaire la difficulté à circonscrire l’aire d’extension des inondations. Joël Le Gall s’était ainsi borné, dans des cartes approximatives, à délimiter les zones d’inondations potentielles, c’est à dire l’ensemble des parties basses de la Ville, du Champ de Mars à la Vallis Murcia.

Il est certain que les données scientifiques comme les cotes métriques des crues ou les lignes des isohypses des parties basses font défaut.

On peut toutefois tenter d’extrapoler à partir de données contemporaines.

Lors de la dernière grande crue de décembre 1870, la cote atteinte fut de 17,22 m et le fleuve inonda une grande partie des quartiers de la Renaissance, c’est à dire le Champ de Mars de l’antiquité. On circula en barque sur le Corso et la Via Ripetta, les Prati devinrent une plaine liquide.

En 1876 commencèrent les travaux d’endiguement qui aboutirent treize ans plus tard : en 1919, le cours urbain des quais était entièrement enserré par des quais. Si l’on tient cette inondation comme référence de paroxysme à l’époque contemporaine, on peut admettre que l’Antiquité ait fourni des exemples de crues au moins aussi importantes et que l’ensemble des points dont l’altitude est inférieure à 17 m est susceptible dtavoir été inondé. Encore faut-il pouvoir les définir. Il faut en effet émettre des réserves sur les cotes fournies par les cartes topographiques contemporaines : à la faveur de travaux de remblaiement ou d’excavation, dont certains contemporains de l’Antiquité, comme c’est le cas pour le Forum Boarium, dans la zone du sanctuaire jumeau de Fortuna et Mater Matuta, des variations significatives pouvant fausser les conclusions.
 

Fort de ces réserves, il  est possible d’établir des cartes où apparaissent non seulement les zones inondables, mais aussi les limites inférieures des zones effectivement inondées. Sans oublier que ces cartes résultent de choix qu’il est possible de justifier, mais aussi de contester.

carte 1 : crues de 193, 189, 181, 156, 54 av
http://aphgcaen.free.fr/conferences/bustany/rome1.jpg
http://aphgcaen.free.fr/conferences/bustany/rome1a.jpg
en 193, c’est le secteur de la Porta Flumentana qui est touché ; rien ne permet de pousser plus loin l’analyse.
en 192, la crue est signalée par Tite-Live comme plus violente que celle de l’année précédente ; elle emporte 2 ponts, le pont Sublicius et sans doute le pont Milvius au Nord du Champ de Mars, signalé par Tite-Live 21.51, 1 (à propos de des événements de 207 av et lié à la construction de la via Flaminia qui permettait de franchir le fleuve).
En 189 av le Tibre envahit par 12 fois le Champ de Mars et les parties basses.
En 181, les sources signalent la rive droite au pied du Janicule
156 av seule la destruction du pont Aemilius est signalé
en 54 av, Cicéron, dans sa correspondance à Quintus, signale une montée des eaux qui emporte la terrasse de son gendre Crassipes : l’inondation de la via Appia s’étend de la piscina publica au Sud de la Porte Capène et jusque dans le quartier du temple de Martis situé à environ 2 km de cette porte. La Vallis Murcia dut servir de chenal d’écoulement, ce qui suppose une crue hors normes : les eaux atteignirent, si ‘l’on en croit les cotes actuelles, 22 m de haut !

La visualisation des aires mentionnées par les sources révèle surtout les choix des auteurs anciens, sans permettre d’établir des limites fiables de l’extension des crues.
 

III Les tentatives de prévention des risques

Les Anciens vivaient avec ces risques qui ne les empêchaient pas d’aménager les rives du Tibre, d’y développer de vastes programmes urbanistiques (sud du Champ de Mars) ou même d’y résider [domus, horti]

Sur le Trastevere, s’était développé à la fois un quartier d’horrea, mais aussi des quartiers populaires et enfin, Auguste fit construire sa naumachie sur les jardins d’Antoine, jouxtant ceux de César.

Pourtant la notion de prévention n’est pas absente :
Il appartenait aux censeurs de limiter l’espace public, de faire respecter ces limites par les particuliers, et de procéder le cas échéant à des expropriations. Ces mesures contraignantes et coercitives fondent en partie l’intuition selon laquelle existait à Rome un cadastre d’âge républicain.

En 48 ap, l’empereur Claude investi de la censure restitua ex forma des zones publiques pillées par des particuliers. c’est dans cette perspective que s’inscrit l’action des censeurs de 54 av qui bornèrent les rives du Tibre avec des cippes, afin de délimiter la zone inondable et d’y proscrire l’édification d’insulae menacées par les crues [noter la concomitance avec la grande crue de 54 ap).

La prévention touche aussi la qualité des constructions, afin que la stagnation des eaux (pendant 7 jours lors de la crue de 5 ap) aient des conséquences moins dramatiques que celles, bien connues des anciens, qui à l’issue du travail de sape de la base des immeubles, entraînaient des écroulements spontanés souvent meurtriers.
En 15 ap (DC 57,14), Tacite (Ann 1,79) le Tibre fait un lac des parties basses de la ville et entraîne en se retirant les débris des édifices et les cadavres des habitants.
Auguste, reprenant sans doute les dispositions d’une loi antérieure mais restée lettre morte -spéculation immobilière, Crassus) fit limiter la hauteur des insulae à 70 pieds, soit environ 20 m (C Saliou, les lois des bâtiments, Beyrouth 1994).

Enfin, certaines dispositions touchent au flux du Tibre lui-même.
César, dans la loi de urbe augenda de 45 av prévoyait, en éliminant le méandre du Tibre, au Champ de Mars, de créer une dérivation du cours du fleuve qui permettrait de lui donner une pente plus forte, et de rattacher une partie de l’ager Vaticanus à la ville (mesure d’urbanisme)
Idem pour les aménagements portuaires d’Ostie sous Claude puis sous Trajan.
Le creusement du canal appelé fossa Traiana offrait une seconde embouchure au fleuve (éviter l’alluvionnement et l’ensablement).

Enfin, l’inondation meurtrière de 15 ap succédant à celle de 12 ap à cause de laquelle les Ludi Martialis eurent lieu sur le Forum d’Auguste car le Tibre couvrait le Grand Cirque (DC LVI, 27) suscita un grand émoi. 2 sénateurs Ateius Capito et L Arruntius présentèrent un projet prévoyant de remodeler le bassin du Tibre : le Glanis aurait été détourné vers l’Arno et le Velinus et le Nar barrés (Tacite, Ann, I, 79) . Les protestations de Florence, d’Interanne et de Réate entraînèrent l’abandon du projet : " Les prières des colonies ou la difficulté des travaux, à moins que ce ne fût la superstition, eurent cet effet qu’on se rangea à l’avis de Pison, qui était de ne rien changer ".

Toutefois, en 15 ap, Tibère intervint en 2 sens :

Il compléta les dispositions du bornage du fleuve : après les cippes des censeurs de 54 av, des nouvelles bornes furent implantées en 8 av avec le concours d’Auguste, qui fit en outre nettoyer le lit du fleuve pour faciliter l’écoulement.

Il créa un collège de curateurs chargés du " lit du Tibre, et de ses rives ", un consulaire et 2 prétoriens : mesure administrative pérennisant des mesures ponctuelles antérieures.

La périodicité des crues a un peu ralenti : 2 au cours du cinquantenaire suivant, en 36 et 69 ap, cette dernière particulièrement éprouvante. L’invasion des eaux, via Flaminia, empêcha Othon de partir en campagne contre les Vitelliens.

Conclusion :

Ainsi, la Rome antique apparaît-elle particulièrement exposée aux risques naturels : à son site de ville-pont accrochée à des collines, s’ajoute la taille d’une agglomération millionnaire, à l’habitat populaire précaire, dont l’emporium et les horrea, situés sur les rives du fleuve, sont en première ligne quand celui-ci entre en crue. L’inondation a alors pour corollaire la menace de disette et d’épidémies qui fragilisent le régime. Ainsi la crise politique de 23-22av (abandon du consulat annuel, rejet par Auguste de la dictature auquel le peuple voulait l’élire de " force " est-elle directement la conséquence des inondations qui ont emporté le pont Fabricius (Dion Cassius 53,33 et 54,1.1) et rendu Rome navigable pendant 2 années consécutives. C’est pourquoi en 22 av Auguste accepta la cura annonae pour résoudre la crise frumentaire.

On comprend à la fois la violence des inondations (ponts emportés, impétuosité du fleuve) mais aussi que le statut de capitale de Rome amplifie les enjeux politiques : l’adhésion de la population urbaine au pouvoir est une absolue nécessité pour la survie du régime, dont la responsabilité est toujours mise en cause.

Insister enfin la subjectivité de nos sources et des témoignages qui nous sont parvenus. Si aujourd’hui l’accent est mis sur les dommages matériels causés aux particuliers, l’Antiquité y est moins sensible qu’à ceux causés aux bâtiments publics et surtout aux temples. l’hypertrophie des récits des dégâts causés aux édifices religieux relève du scrupule religieux : Rome est bien la  ville sanctuaire de Fustel de Coulanges.

Catherine Bustany -

Maîtrise du sol et urbanisme à Rome à l'époque républicaine, Thèse soutenue en 1992 à ParisIV (dactylograhiée).

Rome, maîtrise de l'espace, maîtrise du pouvoir [Texte imprimé] : de César aux Antonins / Catherine Bustany, Noëlle Géroudet. . - Paris : S. Arslan, 2001

Problèmes méthodologiques pour la cartographie es incendies et catastrophes naturelles dans la Rome antique, Cahiers de la MRSH, N° 25, Février 2001, p 11-44

Pour compléter, en ligne, à l’adresse : http://aphgcaen.free.fr/conferences/bustany/
une version word : http://aphgcaen.free.fr/conferences/bustany.doc


documents fournis aux participants :

Le recensement des inondations connues :

http://aphgcaen.free.fr/conferences/bustany/inond1.jpg
http://aphgcaen.free.fr/conferences/bustany/inond2.jpg

Une carte proposant des hypothèses pour les inondations de 193, 189, 181, 156, 54 av JC :
http://aphgcaen.free.fr/conferences/bustany/rome1.jpg
http://aphgcaen.free.fr/conferences/bustany/rome1a.jpg

La copie d’une carte de la topographie de Rome en 52 av
(source : D. Favro, The urban image of Augustan Rome, Cambridge, 1996) :
http://aphgcaen.free.fr/conferences/bustany/rome3.jpg

Une carte des impacts de foudre à Rome, IIIe av - 1ere moitié du Ie ap :
http://aphgcaen.free.fr/conferences/bustany/rome4.jpg

Le site du Plan Bigot :
http://www.unicaen.fr/rome/description.html
http://www.unicaen.fr/rome/index2.html

Dans la PCL, plan tiré The Historical Atlas by William R. Shepherd, 1923 (991 ko)
http://www.lib.utexas.edu/maps/historical/shepherd/rome_athens_imperial_plans.jpg

Maquettes virtuelles de Rome :
http://aphgcaen.free.fr/lecocq.htm

Copyleft - mise en ligne DL - 09/02/2003 - Merci de penser à citer vos sources